Précarité : la force de l’engagement face à une demande croissante

Dernière ligne droite pour les bénévoles de l’opération Été Secours Alimentaire, soutenue par la Fondation Notre Dame, confrontés cette année à une explosion des demandes. Invitée de France Info le 20 août dernier, Marie-Christine Bredin, la coordinatrice, évoquait une demande en hausse de 15 à 20 % sur tous les centres. Un phénomène particulièrement visible à Saint-Hippolyte dans le 13e arrondissement où la fréquentation a bondi de 30 %.

Des habitués et de nouveaux demandeurs

Au sous-sol de la paroisse Saint-Hippolyte règne en ce lundi une effervescence désormais habituelle depuis l’ouverture du lieu au début du mois d’août. Dans le plus grand centre de distribution alimentaire de l’opération estivale, 38 bénévoles sont aujourd’hui postés le long du parcours qui conduit les bénéficiaires de la rue à la salle de distribution.

Car si l’organisation a dû être revue dans le contexte épidémique actuel, la mobilisation, elle, ne faiblit pas.

1 100 colis-repas colorés préparés le matin-même seront distribués d’ici la fin de la journée. Des sacs de couleur rose pour les familles, marron et blanche pour les personnes seules constitués de produits destinés à être cuisinés ou à manger froid, complétés, en fonction des jours, de produits frais donnés par deux AMAP (Association pour le maintien d’une agriculture paysanne) et des commerces du quartier.

Une diversité de denrées appréciée par la file de bénéficiaires formée par des habitués mais aussi par de nouvelles familles et ceux qu’Alain Barbero, le responsable du centre, appelle les « nouveaux profils : des entrepreneurs, des personnes cumulant les petits boulots qui n’ont pas résisté au confinement. »

Une expérience terrain formatrice

Alain Barbero peut compter sur une équipe constituée de personnes âgées, de personnes en situation de handicap, de personnes condamnées à des TIJ (travaux d’intérêt général)… et de jeunes, nombreux cette année. « Il faut bien remplacer les bénévoles plus âgés tenus à distance pour des raisons de santé et de garde d’enfants » explique-t-il.

Des étudiants bénévoles pour certains et stagiaires pour d’autres. « Il y a plusieurs étudiants de grandes écoles qui effectuent leur stage ouvrier [Au total 9 à 10 stagiaires se répartissent sur l’ensemble des centres de l’opération cette année] Une expérience de terrain formatrice qui permet aussi de renouveler la population habituelle de bénévoles » précise le jeune retraité.

Comme Merchrist et Catharina, les deux jeunes en stage ouvrier de cinq semaines présents ce jour-là à Saint-Hippolyte.

Un stage réalisé à cheval sur deux centres parisiens : les lundis, mercredi et vendredi à Saint-Hippolyte et les mardis, jeudis et samedis à Notre-Dame-de-la-Croix de Ménilmontant (20e).

Catharina apprécie la bonne ambiance de travail avec les bénévoles et reconnaît avoir été surprise par le nombre de bénéficiaires. « Plus de 800 personnes sont accueillies dans le 13e arrondissement chaque jour ! C’est bien de se rendre compte de la réalité sociale » avoue la jeune femme.

Un avis partagé par Merchrist qui pensait s’ennuyer en arrivant. Il s’est bien vite rendu compte du contraire après quelques jours passés à confectionner les milliers de colis et à accueillir les centaines de familles. « J’observe différents profils et des réalités quotidiennes dont je n’étais pas au courant ou avec lesquelles je n’avais pas de proximité, notamment les personnes dans la rue » lance-t-il en aidant une femme âgée à déplacer son chariot de courses.

« Rendre à l’aise tous ceux qui franchissent la porte »

Une présence auprès des plus fragiles défendue par Sarah, étudiante et bénévole depuis l’année dernière. « J’ai beaucoup appris de cette expérience très forte humainement. Et puis, en tant qu’étudiante, je ne peux pas me permettre de soutenir financièrement une cause alors j’aide et je rends service à ceux qui en ont besoin. »

Un temps d’écoute aussi. « J’ai pu échanger davantage avec les bénéficiaires que l’année dernière, notamment avec des personnes étrangères qui ne parlent pas forcément le français. C’est plus difficile pour elles de s’en sortir. »

Sarah voit aussi passer des jeunes parmi les demandeurs : « ce n’est pas évident de savoir s’ils sont étudiants. Certains viennent pour le compte de leur famille. »

Alain Barbero regarde ses recrues avec bienveillance. Comme Christian, « fidèle bénévole qui vient chaque année pour aider la seule association ouverte pendant le mois d’août », il apprécie le contact avec les jeunes et loue leur engagement associatif. Tous s’accordent sur le côté humain et la convivialité de ces rencontres. « En tant que bénévoles, aider les autres est valorisant, on se sent utile ! » Un mot d’ordre résumé par la maxime suivante : « prendre les gens comme ils viennent. »

Des paroles qui vont droit au cœur des bénéficiaires comme Odile, assise près de l’entrée, un verre de grenadine à la main. C’est la deuxième année qu’elle bénéficie de l’opération. Placée à l’hôtel pendant le confinement, cette mère de deux enfants désormais relogée dans le Val-de-Marne trouve ici de quoi constituer des repas équilibrés. « L’accueil est super. Tout le monde est gentil avec nous. Ça fait beaucoup de bien. »

Photos : © FLP / FND